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La question de Candide #5 - Sulfite ou soufre

Messagepar Jean-Pierre NIEUDAN » Mar 13 Août 2019 21:56

Comme souvent en France, où l'on ressent un besoin irrépressible de trouver un bouc émissaire, le soufre est pour certains devenu l'ennemi n° 1. Et pourtant…
Par Jacques Dupont

L'usage du soufre, du SO², de l'anhydride sulfureux de son nom complet, a soulagé grandement la viticulture. On peut même parler de révolution dans l'art de faire le vin et dans la manière de l'élever. Jusqu'à une période très récente (fin du XVIIIe siècle), le grand souci des vignerons relevait d'une âpre lutte contre la nature : comment empêcher celle-ci de faire son travail qui consiste à aller jusqu'au bout du processus de transformation du raisin dont la finalité n'est pas le vin mais le vinaigre ? S'ajoute à cela que, Pasteur n'ayant pas encore livré ses travaux sur les « microbes », on ne savait pas lutter contre toutes les maladies, déviations provenant d'une vie microbienne qu'on ne maîtrisait évidemment pas.

L'usage du soufre nous est venu des Hollandais. Aux XVIIe et XVIIe siècles, ce sont les champions du monde du commerce maritime, faisant circuler les marchandises entre nord et sud. Sur les côtes de France, ils recherchent principalement les vins, plus particulièrement les blancs doux. Ces habiles commerçants maîtrisaient parfaitement l'art du coupage, qui consiste à assembler du bon avec du médiocre pour faire du passable et celui du « vinage », l'ajout d'eau-de-vie au vin pour le « fortifier » en même temps qu'on le débarrasse des microbes et bactéries qui pourraient l'altérer.

Désinfectant

Dans ce même univers de la « propreté », les Hollandais ont fait une autre découverte : en brûlant un petit bâtonnet de soufre à l'intérieur d'un tonneau vide, on assainit celui-ci. Le dégagement gazeux de cette combustion trucide toutes les bactéries réfugiées dans les interstices et pores du bois. Alors même que l'on ignore l'existence de ces « infiniment petits » et leur rôle néfaste pour la conservation du vin, ces marchands ont ainsi inventé le moyen de les détruire, le soufre agissant lui aussi en désinfectant. Cette propriété connue depuis l'Antiquité pour assainir les lieux de vie semblait oubliée, avoir disparu des mémoires collectives. En tout cas, elle était très peu usitée dans le monde du vin.

La pratique va peu à peu se faire connaître en France et se développer partout où l'on a besoin de commercer. On en trouve des témoignages dès 1765 à Bordeaux qui exporte vers l'Angleterre, mais c'est au XIXe siècle que, dans la littérature spécialisée, on recommande de bien « mécher » la « futaille » (les tonneaux) avant usage. Depuis, on a cherché, trouvé, peaufiné, grâce notamment à Pasteur, le rôle exact du soufre et comment on pouvait s'en servir au mieux pour protéger le vin. Si le soufre s'est montré un solide compagnon du vigneron en permettant aux bons vins de se conserver et de voyager, il fut également un auxiliaire précieux pour stabiliser les vins des margoulins ou tout simplement des vignerons médiocres et pas trop scrupuleux. On ne peut qu'applaudir à l'idée de produire des vins les plus purs possible, avec moins de SO², à condition toutefois que cela demeure du vin et ne se transforme pas en vinaigre…

Nous avons dégusté des vins vinifiés sans soufre remarquables, mais rarement de grands vins mis en bouteille sans quelques milligrammes de ce produit. Le problème actuel et futur du vin et de sa « digestibilité » ne se réduit pas à 30 ou 40 milligrammes de soufre par litre, mais bien davantage à son taux d'alcool. L'effet du réchauffement climatique et sans doute aussi les nouvelles façons de conduire le vignoble – réduction des rendements, recherche d'une plus grande maturité – ont eu pour conséquence de faire grimper les degrés. Un vin titrant 15 degrés ne correspond plus à la définition que Pasteur en donnait comme « boisson hygiénique ».

Source : https://www.lepoint.fr/vin/la-question- ... 39_581.php
La vérité est dans la bouteille ..( Lao Tseu )
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Jean-Pierre NIEUDAN
 
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