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Les mystères du vin

Messagepar Jean-Pierre NIEUDAN » Mer 8 Sep 2021 21:05

De l’utilité de la bougie pour ne pas mourir étouffé et des fibres de coton pour faire plaisir à la bulle de champagne…

Le vin est une vieille affaire, de 6 000 ou peut-être 8 000 ans. Dans tous les cas, à sa naissance, aucune blouse blanche penchée sur son berceau pour expliquer au vigneron l’action des levures durant la fermentation. Jusqu’à Pasteur, on ne savait pas grand-chose. On faisait comme le grand-père. On transformait, sans trop savoir comment, un fruit en une boisson qui « réjouissait le cœur de l’homme ». L’observation et la transmission remplaçaient la science. Pasteur, on le sait, a mis en lumière l’action des « très petits », des micro-organismes, des levures, mais aussi des microbes et des parasites qui peuvent gâcher la fête. Après lui, ce fut l’autoroute des découvertes.

Très souvent, il s’est agi de comprendre et de mettre des mots sur des phénomènes constatés par les anciens et sur leurs pratiques. Ainsi dans L’Art de faire le vin écrit en 1779, monsieur Maupin détaille pour ses lecteurs comment on peut savoir, à partir de quelques observations, qu’une fermentation est terminée. La première, c’est en « prêtant l’oreille » on n’entend plus « de mouvement ou de bruit ». Parfaitement exact, les levures ont terminé leur travail, c’est repos dans la cuve. Une autre est plus remarquable : « Lorsque la lumière approchée du marc ne s’éteint point. »

Techniques antifraude

Combien de vies de vignerons sauvées grâce à cet usage de la bougie ? La fermentation provoque un dégagement de gaz carbonique inodore mais toxique, qui encore aujourd’hui provoque des accidents. Depuis Maupin, la connaissance du processus qui mène de la racine de la vigne jusqu’au vin en bouteille a fait plus que des progrès. Pour ne prendre qu’un exemple, celui de la fraude, on est capable désormais de pénétrer à l’intérieur d’un atome pour mesurer et comparer le nombre de protons et de neutrons. Ce relevé « isotopique » effectué sur chaque millésime dans chaque région constitue un véritable fichier aussi fiable que celui des empreintes digitales et permet d’affirmer si un vin provient bien du millésime revendiqué.

Pour les très vieilles bouteilles, il y a aussi des repères, notamment la radioactivité. Pour vérifier qu’un 1937 sur l’étiquette est bien un 1937 dans le flacon et pas un bricolage récent, les techniciens de la répression des fraudes vont chercher un marqueur de la radioactivité, le césium. Naïvement, on pourrait imaginer que le pic fut atteint en 1945 avec les bombes sur le Japon. Pas du tout, le maximum dans l’atmosphère, c’est 1964, quand un grand nombre de pays, dont la France, se livraient à des explosions « de plein air ». Parfois une par semaine. Évidemment, si notre 1937 contient du césium, il y a de fortes chances qu’il s’agisse d’un faux.

1 045 014 bulles, vraiment ?

Au rayon scientifique plus positif et amusant figurent les recherches menées par Gérard Liger-Belair, spécialiste de l’effervescence et professeur à l’université de Reims. Le mot effervescence, associé à Reims, laisse deviner aisément quel vin nous allons évoquer par la suite. Ce professeur a passé beaucoup de temps à compter les bulles dans une flûte de champagne. Il y a, selon lui, 1 045 014 bulles, c’est un calcul réalisé dans un verre de 10 cl effectué à la température de 8 °C. Mais c’est potentiellement seulement. Juste une possibilité, car, si on se lance à notre tour dans la même opération (un jour de long confinement peut-être) en tentant de les compter une par une, on risque d’être déçu.

Si on regarde au travers d’une bouteille, rien, elles n’existent pas. « Le champagne qui se trouve dans votre réfrigérateur ne contient aucune bulle de CO2, mais uniquement du gaz carbonique dissous », explique Solène Gradelet, œnologue champenoise. « La condition essentielle pour que des bulles apparaissent dans votre verre est la présence de particules sur les parois internes du verre, par exemple une fibre de textile ou une aspérité. Ces « petits défauts » vont alors piéger des poches de gaz qui se libéreront pour former les bulles de votre champagne. » Un verre totalement et parfaitement lisse – mais cette perfection n’existe pas dans le commerce – ne permettrait pas ce piégeage, donc aucune bulle ne pourrait apparaître dans le vin. C’est pour cette raison que, souvent, on constate une formation de mousse abondante dans un verre alors que celui d’à côté, pourtant identique, n’accueillera qu’une simple collerette.

Le premier a soit subi un coup de torchon vigoureux, soit il est moins bien poli que le second. Certains fabricants, d’ailleurs, comme l’ancien œnologue champenois James Darsonville, font à la demande meuler le fond du verre afin de créer une petite cheminée de bulles qui montent joliment vers la surface. Mais attention, pour profiter pleinement de la fraîcheur et de la qualité de son champagne, il est une précaution sine qua non à observer : ne jamais exposer les bouteilles à la lumière, celle du soleil et celle des néons. Tous les vins sont plus ou moins sensibles à ces rayons lumineux, mais le champagne l'est beaucoup plus que les autres. Et, désormais, on sait pourquoi. Le vin contient de la riboflavine, plus connue sous son nom commun de vitamine B2. Sous l’effet de la lumière, la B2 devient un peu folle et transmet son énergie à d’autres molécules, en particulier aux acides aminés dont le champagne est particulièrement riche. Le résultat n’est guère bon à déguster : goût de cuisson de choux, de savon, de serpillière… Même avec de jolies bulles, ce n’est pas très appétissant.

Du vin en carton

Conseil : si vous ne possédez pas de cave souterraine ou (de cave) d’appartement avec vitre fumée, il est préférable de conserver vos bouteilles dans les cartons bien clos. Enfin, mais cela relève davantage de la physique classique que de la découverte scientifique, toujours au rayon champagne, pour déboucher une bouteille, il faut tenir le bouchon et tourner la bouteille, et non l’inverse : on a bien plus de force et on évite ainsi que le bouchon fracasse le Picasso accroché au mur ou, plus fréquemment, l’œil d’un convive. La science sait beaucoup de choses sur le vin, l’œnologie a fait d’immenses progrès, mais, pour le moment, personne n'est vraiment capable d’expliquer le goût du terroir. Pourquoi tel premier cru bourguignon est-il si différent de son très proche voisin ? Mystère. Et c’est très bien ainsi.

Source : Jacques Dupont
https://www.lepoint.fr/vin/les-mysteres ... 29_581.php
La vérité est dans la bouteille ..( Lao Tseu )
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Jean-Pierre NIEUDAN
 
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