La France et les 14 autres Etats responsables de 95 % de la production viticole ont obtenu gain de cause.
Les viticulteurs européens sont soulagés. Après des mois de combat, ils ont obtenu que la Commission européenne renonce à la libéralisation complète du secteur de la viticulture européenne, comme elle le prévoyait depuis la réforme adoptée en 2008 pour le secteur du vin.
Pendant des années, la Commission européenne s'est montrée intraitable : les droits de plantation qui ont permis de réguler la production pendant des années, devaient disparaître à la fin 2015 pour la grande majorité des régions et en 2018 au plus tard pour tous les territoires. Entre 2008 et 2010, Bruxelles a aidé à arracher 160.000 hectares de mauvaises vignes avec à la clef des financements d'environ 1 milliard d'euros. Selon elle, cet effort devait s'interpréter comme une sorte de solde de tout compte, pour permettre d'éliminer la « piquette » et rendre le secteur suffisamment qualitatif et compétitif face à la concurrence des vins du nouveau monde. Cette dérégulation était poussée par les pays du Nord au nom de la baisse des prix pour le consommateur…
Un système d'« autorisations »
« Une vision libérale totalement inadaptée à un secteur d'activité aussi particulier », s'agace l'eurodéputé français Michel Dantin (UMP), auteur d'un rapport qui réclame au contraire la prolongation des droits de plantation jusqu'en 2030. Les producteurs craignaient un accroissement incontrôlé des surfaces et un bouleversement des territoires, avec l'apparition de vignobles compétitifs en plaine, concurrençant la viticulture traditionnelle des pentes.
Face à la mobilisation des Etats producteurs, emmenés par la France, premier producteur européen avec cette année une « petite récolte » de 43 millions d'hectolitres, la Commission a réuni à partir de janvier un groupe d'experts composés de représentants de la filière et des vingt-sept Etats européens. Ceux-ci viennent de conclure à la « nécessité absolue » de maintenir un dispositif d'encadrement des plantations de vignes partout en Europe et pour toutes les sortes de vin, appellation d'origine ou vins de table. Des conclusions que va présenter et défendre demain en Conseil des ministres de l'Agriculture, Dacian Ciolos. Le ministre français Stéphane Le Foll s'est hier réjoui que « la détermination de la France et des pays producteurs aient permis de trouver une issue… garante de la pérennité de la production viticole et de la qualité de l'offre européenne et française de vins ».
Globalement, le groupe de travail propose de maintenir des « autorisations » et d'en déléguer la gestion à chaque Etat membre, pour être au plus près des différents terroirs. Les autorisations seraient « gratuites, intransmissibles », à l'inverse des droits actuels, et assorties d'un mécanisme de sauvegarde communautaire. Actuellement, quinze Etats membres représentent 95 % de la production. Ces propositions devront s'inscrire dans la réforme de la politique agricole commune, qui doit être adoptée l'an prochain.
Anne Bauer
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